» On admettait naguère qu’en pratiquant un jeu de qualité, on pouvait perdre un match. Mais on considérait ce type d’événement comme un accident, et la seule recette intelligente pour obtenir régulièrement de bons résultats était la pratique du meilleur jeu possible, c’est-à-dire d’un jeu où l’esprit de création, l’intelligence tactique, la maitrise technique, le plaisir de jouer étaient des éléments essentiels. Aujourd’hui [..] le jeu est devenu une notion inutile et encombrante à partir du moment où le poids des intérêts financiers drainés par le football a eu comme conséquence immédiate l’accession à sa tête de gens déterminés à implémenter dans sa gestion l’idée que seul le résultat compte et que les moyens pour l’obtenir en dehors de l’argent se nomment le travail, l’effort pénible, la souffrance et éventuellement la ruse et la brutalité »
C’est une sorte de « Cuisine des Mousquetaires » mais en version compétition culinaire de haut niveau, la différence c’est que les animaux sont déjà morts, la passion, la chaleur et le partage en moins. BBQ Pitmasters c’est la « League des champions » du BBQ quand Micheline et Maité sont dans un club chaleureux de CFA où le plus important dans le match, c’est le passage au Clubhouse après les douches.
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » et nous voilà témoin de la réalisation d’un Barbecue sur des fourneaux au design de Formule 1, de saveurs à base de piqûres dans le steak pour doper le goût mais également de reconstitution à vocation pédagogique en vision 3 D du processus de diffusion de la chaleur dans un four à viande.
Mais les images ne sont pas là par hasard, et de quoi BBQ Pitmasters est-il l’image ?
A l’heure de l’évaluation et de la mesure permanente, de la guerre du tous contre tous dans une logique de progrès indépassable, de la rationalisation de nos faits et gestes, même le week-end, ce concours du meilleur chef BBQ est la représentation de l’ordre implacable, de la planification, du processus de modernisation continue qui désenchante le monde, de ce cercueil de la rationalité qui creuse sa tombe jusque dans nos jardins.
En effet, voilà représenté l’évaluation perpétuelle, le calcul permanent dans les recoins de ce qui nous restait de plus intime ; griller une saucisse. Revendiquons le droit de brûler nos merguez suite à un débat houleux sur la nécessité de cuisiner en dodelinant sur du crunk rap et non sur du Bénabar. Revendiquons le primat du romantisme sur le scientifique.
Comme le souligne G.Orwel « L’homme a besoin de chaleur, de vie sociale et de sécurité : il a aussi besoin de solitude, de travail créatif et de sens du merveilleux. S’il en prenait conscience, il pourrait utiliser avec discernement les produits de la science et de l’industrie, en leur appliquant à tous le même critère : cela me rend-il plus humain ou moins humain ? »
BBQ Pitmaster semble vouloir nous dire que le rouleau compresseur de la rationalisation doit désenchanter ce moment magique qu’est l’improvisation d’un barbecue au son d’un T-Pain dégoulinant, la main dans une glacière de bières. Et pour répondre à Orwell, non un BBQ Chromé ne me rend pas plus Humain ? Le Manala Club refuse la guerre des Egos, celle du canard le plus parfaitement grillé, en somme ce progrès qui détruit jusqu’à la possibilité de sa propre critique puisque nous atomise chacun chez soi derrière notre BBQ rutilant.
Et certains pensent encore qu’il ne s’agit que de TV.
Pour rester éveillé et curieux, pour assumer en plein soleil les délires de la nuit, pour décrypter les images de la TV réalité, pour découvrir notre équation des 00's, le boulevard des clips manalesques, un panorama des artistes nés dans les 80’s, mais aussi les DVD oubliés au fond du tiroir, la techno geek, de la fumée, des lumières et tout le reste.